Sexualité dite “féminine” et recherches scientifiques

Vous l’avez peut-être remarqué, des fois on n’est pas sûres de nous. Et pourtant, on fait nos recherches !

Quand on écrit au conditionnel, c’est tout simplement parce que les recherches autour de la sexualité et du corps des femmes* sont lacunaires. Les avis divergent, et certaines choses restent floues.

L’anatomie féminine n’a été documentée de manière complète que très récemment (1998, o’Connell). Un organe entier, le clitoris, a été mentionné ici et là à travers l’histoire, mais personne n’a jugé nécessaire de l’étudier en détail jusqu’à il y a peu. De manière générale en santé, le sexe masculin est inconsciemment (ou non) considéré comme la norme, et le sexe féminin comme la variante. Les symptômes de la crise cardiaque, par exemple, sont beaucoup moins reconnus chez les femmes, parce qu’ils diffèrent des symptômes inscrits dans les manuels, qui concernent plutôt les hommes (cf. les travaux de Muriel Salle).

On trouve toujours les mêmes exemples d’études scientifiques sur la sexualité des femmes, parce que, peu nombreuses, elles sont donc marquantes et révolutionnaires.

Dans les années 1950, sous l’impulsion de Margaret Sanger et Katherine McCormick, Grégory Pincus invente la pilule contraceptive (c’est une histoire assez sordide, d’ailleurs, même si son application a eu des conséquences très positives).

Les travaux des célèbres Masters et Johnson sur le plaisir et la sexualité datent des années 60. Bien que incomplète, cette étude ouvre la recherche sur ce domaine.

La sexualité est donc un objet de recherche considéré comme à peu près légitime depuis une cinquantaine d’année. Mais c’est l’angle de la santé publique qui prime, notamment depuis l’épidémie d’infection au VIH dans les années 80. Et ces recherches elles aussi sont incomplètes : la transmission des infections et maladies entre femmes* ou même qui ne touchent que les femmes*, est peu documentée. Est-ce quelqu’un va enfin nous dire, preuves et statistiques à l’appui, si la mycose est transmissible sexuellement ?!

 

Les recherches sur le plaisir

Le plaisir sexuel, quant à lui, semble rester une affaire privée, et non digne d’un intérêt collectif et scientifique, malgré quelques études retentissantes (celles d’Anne Koedt, de Shere Hite).

Certes, chez les hommes*, ce n’est pas beaucoup mieux. Si on étudie à tout va leurs troubles érectiles, on se penche beaucoup moins sur les paramètres de leur désir et leur plaisir. Mais il est tout de même de plus en plus reconnu, même dans le grand public, que le rapport sexuel type préliminaires-pénétration-éjaculation est adapté au plaisir du pénis, et beaucoup moins au plaisir de la vulve.

Paradoxalement, le plaisir féminin* est vu comme difficile à atteindre par rapport au plaisir masculin. Il paraît que c’est « trop compliqué »… mais si c’était vraiment le cas, la masturbation féminine* serait une occupation sacrément chronophage ! Ça ne motive pourtant pas les scientifiques à faire des recherches sur son mécanisme…

 

*ici, comme on parle d’histoire et de recherche médicale, on utilise le mot “femme” pour parler d’une catégorie sociale qui pourrait être décrite comme “les personnes reconnues socialement et/ou médicalement comme femmes, qu’elles se reconnaissent dans le terme ou non”.