On parle souvent de la représentation des minorités dans les médias et de la façon dont elle influence la construction et l’image d’eux-mêmes des personnes appartenant à ces minorités. Mais qu’en est-il des représentations de l’homme blanc* hétérosexuel, celui qui représente dans notre société la “norme” ? De quels modèles d’hommes sexualisés dispose-t-il, en particulier quand il s’agit de séduire et de coucher ? Sur une liste trouvée lors d’une exploration (douloureuse…) de l’internet masculiniste, James Bond, Han Solo, Brad Pitt dans Fight Club, Don Draper dans la série Mad Men ou encore George Clooney dans Ocean’s 11 arrivent en tête. Et ce que nous apprennent ces modèles, c’est que le “mâle alpha” obtient tout ce qu’il veut, que quand on ne le lui donne pas, il le prend. Si une femme lui dit non, il persiste jusqu’à ce qu’elle dise oui.
La masculinité toxique se traduit par une survalorisation de la “virilité” et une dévalorisation de la féminité. Le sexisme et l’homophobie en découlent directement, bien sûr, et les violences qui y sont associées.
Dans des relations hétérosexuelles, elle se traduit entre autres par l’attachement à des rôles genrés bien définis et rigides : le “mâle alpha” considère qu’une femme doit être passive, et un homme, actif (peut-être pas dans ces termes, peut-être de manière plus insidieuse). Au mieux, cela donne un manque total d’écoute et de communication dans le couple et dans la sexualité. Au pire, des relations sexuelles non consenties et de la violence intra-familiale.
Par ailleurs, pour s’intégrer dans certains cercles masculins, il sera nécessaire d’adopter des comportements sexistes, de se vanter de ses conquêtes (et dans le mot “conquête”, n’y a-t-il pas la notion d’agression, d’invasion non consentie ?). La masculinité toxique devient alors contagieuse… Comment résister à cette pression sociale quand on est ado par exemple, qu’on n’a pas le recul pour démêler le sain du malsain, quand on a peur d’être rejeté ou même de devenir soi-même victime ?
Eh oui, la masculinité toxique l’est également pour celui qui l’a intégrée… Car, en plus d’un impact néfaste sur les autres, certaines caractéristiques associées à la masculinité peuvent se révéler désastreuses pour la santé mentale des personnes elles-mêmes. Ne pas apprendre aux petits garçons à exprimer leurs émotions négatives autrement que par la colère a des conséquences sur la façon dont ils gèrent leurs émotions tout au long de leur vie. Pour citer un site internet destiné à apprendre aux “vrais” hommes à séduire les femmes (beurk), “le mâle alpha contrôle ses émotions”. Sauf que, des études scientifiques le disent et le redisent, nier ses émotions ne fait que leur donner plus de place et de pouvoir. Combiné à l’idée qu’un homme ne doit pas demander de l’aide, surtout pas psychologique, au risque d’être perçu comme faible, cela peut s’avérer catastrophique. En effet, seules deux options demeurent : tout garder pour soi et cacher sa souffrance, ou la reporter sur les personnes de son entourage, de manière violente. Et qu’en est-il des hommes et des garçons victimes de violences (physiques, sexuelles, psychologiques…) ? La mise en avant d’un idéal d’homme fort, sûr de lui, actif sexuellement, etc, accroît leur difficulté à se dire victime, à demander de l’aide, et impacte durablement l’image qu’ils ont d’eux-mêmes.
Par ailleurs, à la façon des images de beauté féminine inatteignables dont les femmes sont en permanence bombardées, cet idéal d’homme fort est à l’origine de nombreux complexes. En effet, les idées reçues (issues du porno, des vantardises entre amis, des films…) sur ce que doit-être un “bon” rapport sexuel ne sont pas seulement déconnectées de ce qui procurent réellement du plaisir aux partenaires concerné·e·s, elles créent aussi une terrible pression sur les garçons eux-mêmes : bander longtemps, être des partenaires parfaits (selon des normes extérieures et non relatives aux participant·e·s…), en “avoir une grosse”, être musclés, minces, endurants. Vous pouvez relire notre texte sur l’anxiété de performance, très présente chez les hommes. Et allez voir les comptes insta @tubandes ou @lesgarconsparlent pour creuser !
*nous ne parlons que de masculinité toxique blanche ici, nous ne nous sentons pas légitimes ni assez informées pour nous prononcer sur une masculinité racisée.